Sans doute connaissiez-vous ce vestige du passé, cette tour carrée à l’état de ruine monumentale qui marquait de sa présence imposante la petite route qui menait de Mallin à Biennassis, deux des châteaux de Villemoirieu.
Vous ne la verrez plus : la tour a été récemment démolie.
      Rasé, évacué, disparu ce témoignage d’époques révolues ou les maisons devaient être « fortes » : nous voilà définitivement  privés d’une partie de notre mémoire matérielle collective, qu’on peut aussi désigner sous le nom de patrimoine. Cet édifice était d’ailleurs porté sur l’inventaire du patrimoine culturel (cliquez là). Pour autant, le fait d’avoir été identifié comme un élément remarquable n’a pas suffi à motiver les travaux de conservation qui auraient pu limiter sa dégradation, ni à le protéger de la démolition. En effet cet inventaire  n'est pas une protection juridique émanant de l'Etat. Il n'a aucune portée juridique
    La maison forte de Ville a été pour la première fois été mentionnée sur un document en 1339 ; après avoir subi au cours des temps de multiples aménagements, elle avait finalement été détruite en grande partie dans un incendie en 1919. En termes d’histoire récente, en 1984, une vue pleine page de sa tour carrée ruinée illustrait le bulletin municipal de Villemoirieu : elle faisait donc bien partie du patrimoine culturel villemorantin !
     Sa disparition, validée par un permis de démolir en bonne et due forme, remplit de tristesse tous ceux qui apprécient les paysages de ces collines, dont le charme romantique vient en grande partie de ces châteaux, fermes, fours, murs et autres "tas de cailloux". Notre campagne est riche de toutes ces constructions minérales plus ou moins bien conservées ; elles lui confèrent son attrait paysager, mais de plus elles  interpellent à chaque instant le promeneur sur ce qui s’est passé là « avant ». Dans l’Isle Crémieu l’ « avant » a commencé il y a fort longtemps et grâce à une situation tectonique et climatique privilégiée les témoignages du passé sont encore nombreux. C’est une chance que nous envient de très nombreux touristes venus de pays sans histoire : ces richesses du patrimoine culturel ne devraient pas disparaitre de la main de l’homme ! En Syrie c’est un acte de guerre de détruire un arc de triomphe de 2000 ans, en France la négligence et  l’indifférence suffisent à aboutir à la démolition d’une tour de 700 ans.
   Des dispositifs de protection existent pourtant : au niveau national, les bâtiments recensés à l’inventaire des monuments historiques font l’objet d’une protection particulière. Au niveau communal, les mairies peuvent se doter d’une AVAP (Aire de mise en Valeur de l'Architecture et du Patrimoine – remplace la ZPPAUP) : le but est plus globalement d'assurer la protection du patrimoine paysager et urbain et mettre en valeur des quartiers et sites à protéger pour des motifs d’ordre esthétique ou historique, en instaurant un « règlement » lié à une « carte de zonage ». Les travaux sont alors soumis à la délivrance d’autorisation par des personnes compétentes (Architecte des Bâtiments de France).La commune de Crémieu s’est dotée de ce dispositif qui comporte de nombreuses contraintes, mais dont l’objectif ambitieux n’est ni plus ni moins que la préservation du caractère historique de la cité. La commune de Villemoirieu, par contre n’en a pas. Dommage pour cette tour , et pour les générations futures de Villemorantins.